Mémoire (feat. Géraldine Lapalus)

Madame, ce n'est pas c'que m'a dit mon père

De jour en jour, j'connais son parcours, ça me rend fier

De chantier en chantier, il a vécu l'enfer

Sa voix est douce, ses mains sont lourdes comme la pierre

Vous savez, il vient d'loin, je n'cesse d'y penser

Il voulait ni les faire rire ni les faire danser

(Qui ?) Les Français ou bien les mouzoungou

Leurs blagues racistes n'étaient pas a son goût

Il dit toujours : « On a d'la chance, on a à manger

Sois bon a l'école, contente-toi de parler français »

Immigrés entassés dans des baraquements

Il dit qu'sans nous la France aurait parlé allemand

Du meilleur au pire, j'entends les soupirs

Et ça m'rend tout triste du haut d'mes douze piges

Souvent moqué pour sa couleur de peau

Des cicatrices et douleurs de dos

Femmes et enfants, le forge au bout du compte

Il a une famille en France, et l'autre au bout du monde

Pour s'insérer, il avait pas l'pedigree

Comme dit Yamina Benguigui dans Mémoires d'immigrés

Madame, ce n'est pas c'que m'a dit l'histoire

L'histoire du Maghreb et du peuple noir

Si le futur s'est noyé dans un trou noir

C'est qu'le passé a été plongé dans le brouillard

J'ai lu des tas d'livres sur l'esclavage

La France a des dettes, a fait des dérapages

Elle doit beaucoup à sa sœur aînée

Fratricide où l'Afrique s'est fait suriner

Loin d'ces politiques, d'leur prison dorée

Il s'est passé des horreurs sur l'île de Gorée

Des fouets trop grands pour tenir le coup

Des cellules trop petites pour tenir debout

Maintenant les noirs sont coupables ou dans l'sport

C'est l'couloir numéro sept ou le couloir de la mort

Si on les dénonce, l'Europe ne vous loupe pas

Demande à Kadhafi, demande à Lumumba

J'me sens d'ici, j'suis né à Marseille

J'suis plus un négro, j'suis un héros des séries Marvel

J'me fous d'vos livres, des éditions Atlas

J'm'arrête, j'ai pas envie d'faire pleurer toute la classe